Spiritualité

Pour entrer dans l’esprit de l’Assomption il y a une porte et une clef : Le Royaume de Dieu et l’amour de Jésus-Christ. Pour y entrer et pour y respirer largement à deux poumons, le Père Emmanuel d’Alzon notre fondateur nous a donné deux devises : « Que ton Règne vienne » et « À cause de l’amour de Jésus Christ ».

Que retenons-nous du charisme d'Emmanuel d'Alzon, déclaré vénérable par Jean-Paul II en décembre 1991 ? Quelle est l'originalité de prendre comme carte de visite la citation du Notre Père : "Que ton règne vienne" (Adveniat Regnum Tuum, ART) en nous et autour de nous ? Le P. d'Alzon nous invite à nous concentrer sur l'essentiel : L'amour de Jésus-Christ, de la Sainte Vierge et de l'Église: Ce triple amour s'exprime dans le présent : on parle d'accents sociaux, doctrinaux et œcuméniques, inspirés par Saint Augustin, autour de la charité, de la vérité et de l'unité.

175 ans après la fondation, ces traits familiers ont trouvé leur place dans de nouveaux territoires et cultures. Au total, 10 branches religieuses sont nées de l'inspiration d'Emmanuel d'Alzon et de ses successeurs. Du sud de la France à ses origines aux cinq continents, l'esprit a pris forme.

Voilà le caractère fondamental de notre congrégation!

  • LE CHRIST NOTRE PLUS FORTE RAISON DE VIVRE :

Appelés par Lui

Appelés et envoyés par lui, nous voulons le suivre radicalement, en laissant sa vie façonner la nôtre dans l’unité et la communion fortement soulignées. Notre prière, notre action se modèlent sur les siennes. Comme lui et avec lui, nous voulons être témoins de l’amour du Père et solidaires des hommes, être des hommes de foi et des hommes de notre temps. Alors aimant comme lui, nous vibrerons aux joies et aux drames d’aujourd’hui et nous témoignerons joyeusement de la Réconciliation en Christ, inséparable de la promotion de tout l’homme.

Derrière Lui

Nous sommes appelés à suivre radicalement le Christ sur les chemins de l’Évangile. Sous l’action de l’Esprit et à l’exemple de Marie, nous choisissons de risquer notre vie dans l’aventure de la rencontre de Dieu. Nous reconnaissons en Jésus-Christ l’homme parfait et nous trouvons en Dieu notre plus forte raison de vivre et d’agir. De tous, il veut faire son peuple, ses amis, ses fils.

Comme Lui

A la suite du Christ, totalement au service du Père, nous choisissons le célibat en vue du Royaume. Nous orientons vers Dieu tout l’amour que nous pouvons donner et recevoir. Plus nous aimons comme le Christ, plus nous pourrons vivre, sous son regard, nos relations humaines et plus nous serons sensibles aux joies, aux souffrances et aux inquiétudes des hommes. Notre obéissance s’enracine dans celle du Christ. Sa fidélité au Père et l’amour des hommes l’ont conduit au don total de lui-même. Venu pour servir, il s’est fait obéissant jusqu’à la mort.

Frères en Lui

Appelés par le Christ, source de toute unité, nous choisissons de vivre en commun selon la Règle et l’esprit de St Augustin, en vue du Royaume. L’avènement du règne de Jésus-Christ pour nous et le prochain s’accomplit déjà dans notre vie commune. Nous nous acceptons différents, car Celui qui nous unit est plus fort que ce qui nous sépare. Il faut constamment dépasser nos divisions et nos limites pour nous retrouver dans l’accueil et le pardon.

Priant avec Lui

Notre prière s’exprime en louange au Père pour la révélation de son amour et en action de grâces pour ce qu’il fait en nous et dans les hommes. Elle nous conduit aussi à demander, pour le monde et pour nous, son pardon et la force d’accomplir sa volonté. En retour la prière nous obtient intimité filiale avec Dieu, vigueur dans la foi et générosité dans l’action. L’Eucharistie en est le centre.

  • LE ROYAUME DE DIEU :

Notre devise : Adveniat Regnum Tuum (ART) - Que Ton Règne Vienne

Cette demande, ce cri, cette espérance sont ceux de tout chrétien qui prie le Père. Il y a ici une simplicité relative d'une devise qui n'est pas "propriété" de l'Assomption mais en laquelle tout chrétien peut se reconnaître. Cela traduit bien l'ambition de l’Assomption : être au cœur de l'Eglise et du monde.

Notre fondateur, Emmanuel d'Alzon, résumait ainsi son intuition : "Notre vie spirituelle, notre substance religieuse, notre raison d'être comme Augustins de l'Assomption, se trouve dans notre devise Adveniat Regnum Tuum: avènement du Règne de Dieu en nous et autour de nous".

Bruno Chenu était assomptionniste et théologien. Il a su placer notre fondateur et sa devise «Vienne Ton Règne ! » sous la lumière de la théologie contemporaine. Ainsi, il a invité le religieux apostolique, passionné du Règne de Dieu à être aussi un veilleur en attente du Règne, et un jardinier du Règne.

Passionné du Règne de Dieu

Pour le P. d’Alzon, le Règne de Dieu en nous d’abord et autour de nous, c’est le double versant de la sanctification personnelle et de l’évangélisation universelle. Mais la théologie contemporaine élabore une théologie du Règne de Dieu plus immédiatement biblique et incontestablement prophétique.

Prophète du Règne de Dieu

Dans le Premier Testament, le prophète est d’abord concentré sur le présent. Il évalue l’actualité en renvoyant au passé de l’Alliance et en annonçant l’avenir qui peut être radieux ou calamiteux selon la fidélité du Peuple de Dieu. La vie religieuse apostolique, au contraire, part de l’avenir et de l’avenir ultime. C’est ce qu’on appelle la dimension « eschatologique » de la vie religieuse. Le religieux fait mémoire de la fin. Il vit à partir de l’espérance. Il ne peut se satisfaire du « déjà-là du Règne de Dieu ». Il désire ardemment le temps de l’accomplissement et de la transfiguration du monde.

Veilleur, en attente du Règne

Dès lors, le religieux se met en position de veille, dans l’attente de Celui qui vient. Sa patrie est la Jérusalem céleste. « Notre cité se trouve dans les cieux » dit-il avec l’apôtre Paul (Philippiens 3, 20). Et les vœux de la vie religieuse se comprennent d’abord dans cette perspective. Par leur vie et leurs paroles, ils sont une invitation et parfois une provocation pour tous à servir le Seigneur avec une pureté totale et gratuite, en fidélité avec le pacte d’amour. Ils remettent en valeur et en mémoire le projet originel de Dieu (obscurci par le péché), et ils sont le signe de l’impatience avec laquelle toute l’humanité attend la pleine révélation de la gloire du Fils (cf. Rm 8,19-21). Par rapport aux laïcs, les religieux attestent davantage la dimension «à-venir» du Règne de Dieu. Ils précipitent l’à-venir dans l’actualité. Ils « présentifient » le Règne futur. Il n’y a rien de plus urgent que de « chercher le Royaume de Dieu et sa justice » (Mt 6, 33). Au fond, des hommes et des femmes ont été saisis par la beauté de Dieu. Ils ont donc pensé qu’ils n’avaient pas trop de toute leur vie pour chanter cette beauté dans l’action et/ou la contemplation, la parole et/ou le silence, la solitude et/ou la vie fraternelle. La dimension contemplative n’est donc pas réservée à ceux que l’on appelle « moines ». Elle appartient à l’essence de la vie religieuse apostolique.

Jardinier du Royaume

Mais, tourner ses regards vers le terme n’est pas se mettre en congé de l’histoire. Le temps présent est celui de l’Incarnation de l’ultime. Car l’attente est active. C’est pourquoi, il est tellement donné au Royaume que le religieux veut en détecter et en faire grandir la semence dans la vie actuelle par le travail et la mission. Il est jardinier du Royaume. Son cœur s’élargit aux vastes espaces de l’action de Dieu dans l’histoire. L’espérance, tirant l’homme en avant de lui-même, a toujours un impact important sur le quotidien, alors que les hommes peinent à se donner un avenir de paix et de solidarité. Notre Occident a bien besoin d'une thérapie de l’espérance pour trouver un sens à son existence.

  • L'AMOUR DE LA SAINTE VIERGE

Le P. Emmanuel d’Alzon a recueilli dans une formule assez percutante l’esprit qu’il entendait imprimer à sa congrégation. On pourrait l’énoncer de la façon suivante : travailler à l’avènement du Règne, en aimant le Christ et ce qu’il a aimé le plus, Marie, sa mère et l’Église, son épouse. Dans nos familles religieuses, nous avons été fortement marqués du sceau de ce « triple amour ».

Le P. Emmanuel d’Alzon a voulu explicitement placer sa congrégation sous la tutelle de Notre-Dame de l’Assomption, en nous donnant :

« Les Constitutions des Augustins de l’Assomption ».

Beaucoup de ses oeuvres naissantes s’épanouissent sous la protection de Marie: le collège de l’Assomption à Nîmes, berceau de la congrégation, l’association Notre- Dame-de-Salut, le premier noviciat des Oblates de l’Assomption au Vigan, Notre- Dame de Bulgarie, le premier alumnat Notre-Dame des Châteaux, source de nombreuses vocations.

Le P. Emmanuel d’Alzon s’est réjoui de la proclamation du dogme de l’Immaculée Conception, par le pape Pie IX, en 1854. Il espérait secrètement, mais sans impatience intempestive, celle du mystère de l’Assomption.

Lui-même fréquentait assidûment, avec les élèves, les professeurs, les frères, les lieux de pèlerinage de son diocèse et des environs : Notre-Dame de Rochefort, Notre-Dame de Grâce, Notre-Dame de Bonheur à l’Espérou. Il aimait s’arrêter à Notre-Dame des Victoires, à Paris, Notre-Dame de Fourvière, Notre-Dame de la Garde. Ne se rendra-t-il pas, sans précipiter les événements, à La Salette, puis à Lourdes, dix ans après les apparitions ?

Dans tous ces lieux et dans la contemplation des divers mystères de Marie, le P. Emmanuel d’Alzon retrouve la Vierge des évangiles, docile à la Parole, disponible au projet de Dieu sur l’humanité, présente, discrète, aux tournants cruciaux de la vie de son Fils, debout au pied de la Croix, assidue à la prière, au milieu des disciples, dans l’attente de l’Esprit. «Pour connaître la Sainte Vierge, l’évangile suffit» Ceci nous convient parfaitement.

Les rares échos qui nous sont parvenus de la prière de Marie dans les évangiles sont humble acquiescement, louange émerveillée, confiance absolue. Le P. d’Alzon s’en est largement imprégné. Ils pourraient féconder, sans la moindre réticence de notre part, notre propre élan de la prière des serviteurs du Royaume.

  • L'AMOUR DE L'EGLISE

Appelés par le Christ, source de notre unité, nous choisissons de vivre en commun selon la Règle et l’esprit de saint Augustin en vue du Royaume !

Au service de l’Église

La communauté n’est pas un but en soi pour Augustin. Elle n’a de sens que pour favoriser la quête de Dieu et la vie apostolique. La communauté augustinienne a donc une vocation profondément ecclésiale. Comme l’indique le Père André Brombart, assomptionniste, cette vocation ne lui est pas extérieure ou surajoutée. Quelles que soient les « oeuvres » dans lesquelles elle s’exprime, elle consiste fondamentalement à créer et à faire vivre un « tissu communautaire » plus large. C’est pourquoi l’harmonie communautaire est le meilleur témoignage de la Bonne Nouvelle annoncée. « Si vous avez de l’amour les uns pour les autres, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples » (Jn 13,35). Personnellement, Augustin aurait préféré une vie retirée, consacrée à la recherche de Dieu.

Mais il ne s’est pas dérobé aux besoins de l’Église : « le clerc a fait profession de deux choses, il a embrassé la sainteté et la cléricature : la sainteté pour l’intérieur car c’est en vue de son peuple que Dieu fait un clerc… » (Sermon 355, 6). Il a voulu communiquer sa passion de Dieu et celle de l’homme.

Nous aussi, arrêtons-nous pour regarder notre monde. Séparons le bon grain de l’ivraie. Plus profondément encore, découvrons- y le Christ. « Vois le Seigneur, vois celui qui est ta tête et le modèle de ta vie » (Sermon 296, 6). Arrimé à lui, en nous appuyant les uns sur les autres, les yeux fixés au ciel, nous aurons plus de chance de faire goûter à tous « le temps de la miséricorde ». Pour avoir pleinement part à la vie future, concentrons nous sur la vie présente. N’ayons d’autre désir que de communiquer le bonheur de vivre réconciliés, en frères. Nous avons reconnu la source de toute beauté ? Alors partageons-là en Église, avec tous !